Coupé du Monde

Il arrive parfois que des évènements mondiaux se télescopent involontairement et traduisent à merveille l’état du monde et de la planète. Nous sommes en 2022 et pendant que la COP27 essaye d’éviter d’accoucher d’un nouveau fiasco, alors que se joue notre avenir et surtout celui de nos enfants, le grand barnum footballistique débute demain au Qatar. Une compétition marquée du sceau de l’infamie écologique, sociale et humaine.

Tandis que des footballeurs multi-millionnaires vont s’affronter en plein désert dans des stades climatisés, voir les pays du monde entier s’écharper pour savoir si il est acceptable de fixer des objectifs de réchauffement climatique à 2,5, 2,8 ou 3 degrés, bien loin des accords de Paris passés depuis longtemps à la moulinette de la realpolitik sous le poids des lobbys économiques, relève d’une forme d’ironie teintée de cynisme triste à pleurer. L’évènement planétaire qui se déroule sous nos yeux, et que nous feignons pourtant d’ignorer, n’est évidemment pas celui qu’on croit. Comme l’incarne à merveille le personnage joué par Di Caprio dans l’excellent film éponyme : Don’t look UP mes amis.

Si les considérations écologiques ne suffisaient pas à elles seules à justifier un boycott de la compétition, à défaut d’espérer une annulation pure et simple de celle-ci, les droits de l’homme bafoués, les ouvriers exploités jusqu’à la mort et la corruption généralisée viennent compléter un tableau peint avec un mélange de sang et d’encre à billets.

Le football ne devrait pas être utilisé à des fins politiques paraît-il. Pourtant le football a toujours été un instrument politique. Rappelez vous l’Argentine-Angleterre de 86, le France-Bresil de 98, le France-Algerie 2001, la Coupe du Monde à la gloire de Poutine en 2018… Les précédents sont nombreux. Les Qataris ont bien compris comment utiliser l’événement qui leur a été offert sur un plateau d’argent comme un sommet de leur stratégie de soft power mise en place depuis plusieurs années avec la bienveillance intéressée des puissances occidentales dont la France en première ligne.

Certains estiment qu’il est trop tard à présent pour s’insurger, qu’il est trop tard pour défendre la liberté d’expression, trop tard pour promouvoir la liberté de conscience, trop tard pour affirmer la liberté d’orientation sexuelle, ou encore trop tard pour exiger celle de toutes les femmes…Ce serait trop demander aux footballeurs de porter un simple brassard en signe de soutien symbolique envers certaines minorités victimes de ségrégation et de répression. Ce serait trop leur demander d’agir en citoyens du monde éclairés, conscients d’enjeux qui dépassent largement le cadre sportif et de la tribune qui s’offre à eux. Ben voyons…Don’t look UP, Don’t look Qatar 2022.